Comme si tout ne commençait pas par un verre.

T'es dans un vieux bar en demi sous sol. Un de ceux, rares, qui acceptent les noirs comme clients.

T'en es à ton deuxième verre. L'ambre hypnotique du whisky n'arrive pourtant pas à te distraire de l'éclat incroyable du cristal qui pend à la petite chaine argentée glissée autour de tes doigts. La Larme de Marie. Elle semble produire sa propre lumière. Et c'est peut être ça qui arrive à te convaincre que tu n'as pas rêvé, ou fait un bad trip ou...bref. Que tout ça est bien réel.

Le serveur, curieux , tout en nettoyant un verre, parait tout autant captivé par le bijou. Ainsi qu'un policeman , assis un peu plus loin, qui se lève et s'approche de toi.

-" Jolie breloque !"

Ta réponse est laconique, lointaine. Peut être n'as tu même pas répondu.

-"Vous l'avez acheté où ? Non, mais, c'est parce que je ne vois pas la boite... Alors, je me demandais..."

Bien sûr, il se demandait si tu ne l'avais pas volé. Un beau bijou, un noir. Ca t'étonne presque de ne pas être déjà en taule.

Le barman a l'air finalement moins sympa maintenant. Il s'accoude face à toi et ne quitte pas le pendentif du regard.

Le flic continue, vaguement subjugué par la Larme :

-"J'espère que vous n'avez rien à vous reprocher quand à la possession de ce caillou."

Il sourit. Convoitise. Main sur la matraque.

Sans trop savoir pourquoi, tu lèves les yeux et plante ton regard dans le sien. Ta voix est calme. Comme dépossédé de ton corps, tu t'entends dire :

-"Et vous, monsieur l'agent, qu'avez-vous exactement à vous reprocher ?"

Une lumière blanche passe fugacement dans ses yeux. Il balbutie un peu. Une larme coule sur sa joue.

-"je..je...on n'aurait pas dû. C'est mal. Mais on se sentait seuls. On planquait depuis 3 jours. Alors, quand Bryan m'a embrassé...j'aurais pas dû...C'est de sa faute...On n'aurait pas dû..."

Il se tait. Il pleure. Le silence est assourdissant. Il sort de sa torpeur et te regarde comme s'il ne prenait seulement conscience de ses propos. Son regard est étrange, entre la haine et le soulagement. Il se lève et sort précipitamment du bar.

Le barman se détourne et fait comme s'il n'avait rien entendu. Il va nettoyer un autre coin du bar. Loin.

La larme a perdu de son éclat. Le whisky n'a jamais été aussi doux.